Aún resuenan los ecos del éxito de Lucio Silla en la Mozartwoche, y aprovecho este post para compartir la bella pintura de Gemma (danke schön!) y también parte de una muy interesante crítica publicada en ResMusica, por Francoise Ferrand, con el título de MOZARTWOCHE DE SALZBOURG, L’AUTHENTICITÉ AU SERVICE DE L’EXCELLENCE
Avec ce Lucio Silla, Minkowski réalise un coup de maître à la tête de ses Musiciens du Louvre. Réussite intrinsèquement liée au choix du metteur en scène Marshall Pynkoski, du décorateur et costumier Antoine Fontaine et de la chorégraphe Jeannette Lajeunesse Zingg formant une équipe de stars du visuel: nous assistons, chose trop rare, aux noces de la mise en scène et de la musique. C’est une vraie redécouverte de la dimension de cet opéra, sa grandeur, sa charge poétique et émotionnelle. Les gestes des chanteurs et des danseurs (la musique de danse de Mozart existe) sont d’une densité qu’accentue l’économie de moyens, une main levée, un embrassement, et voilà la musique habitée par ce lyrisme des corps y compris lors des interventions du chœur (Salzburger Bachchor).
Pins et cyprès de Rome traités en silhouettes encadrés de colonnes aux proportions somptueuses occupent le fond de scène puis des portes de palais, closes, aux couleurs chaudes, sans oublier ce cimetière antique, aux urnes de marbre noir où les torches accompagnent le rituel de danseurs endeuillés. La nature et l’art imposent le silence. La vue est au seul service de l’écoute dans une exaltation mutuelle de ce qui s’entend et de ce qui se voit. Le livret de Giovanni de Gamerra convient à merveille au lyrisme propre à l’opéra séria. A la différence d’ Harnoncourt et d’autres chefs, Minkowski ne se permet aucune coupure dans les récitatifs, préservant ainsi la respiration de l’œuvre ; Mozart, que l’on sent à l’aise dans la durée de l’opéra séria, comme dans son unité, a besoin de l’alternance des récitatifs secs et accompagnés qui permettent aux airs, avec leur structure répétitive, de traduire longuement les affects. Le jeune compositeur a mis un soin infini dans l’adaptation de la musique aux mots, à la versification. Les chanteuses, Olga Peretyatko (Giunia), Marianne Crebassa (Cecilio), Inga Kalna (Cinna) et Eva Liebau (Celia) sont éblouissantes, avec en particulier, un art consommé du legato. L’air de Giunia, invoquant son père devant sa tombe, « Dalla sponda tenebrosa », d’une poésie racinienne et annonçant déjà Don Giovanni atteint un sommet du lyrisme. Au troisième acte, les adieux du couple avant l’emprisonnement de Cecilio surent bouleverser l’auditoire qui, au reste, envoya des ovations aux interprètes à la fin de chaque air ! Rolando Villazon (Silla) de violent tyran immature transformé en un prince clément, aimant son peuple sut avec quel art, incarner ce nouveau personnage : loin de se faire valoir, il est tout simplement descendu dans la fosse, parmi les musiciens ; il chante souplement, comme il ferait d’un air populaire, le retour à la démocratie, à la liberté ; hautbois et flûtes, assis au bord du plateau, l’accompagnent : c’est Orphée dont le chant transforme le monde, face à un espace immense contre le ciel, qui s’ouvre soudain, pour un dernier tableau fugitif aux douces couleurs de Canaletto.
Bien sûr, devant ces merveilles, les spectateurs sont d’autant plus enthousiastes qu’ils se sentent libérés à leur tour, heureux totalement, comme délivrés des déplaisirs d’interprétations irritantes tant de fois subies et bloquant l’écoute de la musique au lieu de la servir. Reprise au Festival d’été, sans doute une des plus belles productions de Salzbourg.