foto: Catherine |
- Merci a Danièle et Catherine pour leurs intéressantes chroniques et photos -
Mon Don Giovanni à Berlin
C'est avec beaucoup d'impatience que j'attendais cette date du 24 octobre car je voyais mon premier Don Giovanni sur scène, avec Rolando. J'avais entendu beaucoup de critiques sur la mise en scène de Guth, mais je n'ai jamais d'à priori quand je vais voir une oeuvre, j'aime me faire une opinion personnelle.
J'ai aimé ce décor de forêt, une originalité, un modernisme, une relecture de l'oeuvre qui m'a semblé intéressante, avec un Don Giovanni fragile, blessé par le père de Dona Anna, dès le début de l'opéra, affaibli, et qui semble de ce fait, beaucoup moins cynique et antipathique.
L'opéra commence comme une farce, où Rolando semble beaucoup s'amuser, avec quelques gags sur scène, puis le rire devient grinçant avec un Don Giovanni qui séduit toutes les femmes qu'il rencontre. D'après moi l'action est censée se passer dans les années 1950 ou 1960, avec les turpitudes que l'on connait, drogue, tabac, alcool, femmes faciles pour ne pas dire putains.
J'ai aimé la cohésion de toute l'équipe, l'interprétation et la qualité de toutes le voix, sans exception, j'ai admiré la performance de C Maltman, aussi bien vocale qu'athlétique, ainsi que celle de tous les artistes, qui devaient chanter sur un plateau tournant, et éviter les racines, troncs d'arbres et rochers ! Je n'ai pas aimé ce que Guth a fait de Don Ottavio, un être insipide, veule, incapable de prendre une décision, et qui ne m'a pas semblé être vraiment amoureux de Donna Anna.
A mes yeux, Rolando n'était pas crédible dans ce rôle, lui qui d'ordinaire endosse tous ses personnages. Ce Don Ottavio, était bien trop loin de la personnalité de Rolando, ou bien peut-être que lui-même n'y croyait pas vraiment. Rolando a magnifiquement, interprété ses deux airs, Dalla sua pace et Il mio tésoro, avec une voix d'une douceur et d'une suavité que lui seul possède. Magique !!!
J'ai aussi regretté que le grand musicien et chef d'orchestre qu'est Daniel Barenboim, ait couvert les voix des chanteurs à plusieurs reprises.
En conclusion: une mise en scène originale et intéressante, qui ne me laissera pas de grands souvenirs,ni de plaisirs esthétiques, comme a pu le faire le merveilleux "Lucio Silla" de Marshall Pynkoski, et les extraordinaires mises en scène de Rolando dans son Werther et son Elisir d'amor.
Danièle
DON GIOVANNI - Berlin 24 octobre 2013
Avant d'écrire mes impressions sur cette soirée, je dois préciser que c'était la première fois que je voyais cette oeuvre en live et que, n'étant pas fan des opéras de Mozart -(pardon, cher Rolando !)- je ne le connaissais que par les retransmissions télévisées.
La forêt du mensonge
Au premier abord, sachant que cette production créée à Salzbourg avait eu de nombreux détracteurs, je fus agréablement surprise par les grands sapins nimbés de très beaux éclairages où les protagonistes semblaient comme perdus et fragiles, mais malgré le plateau tournant offrant des images diversifiées, un élément clef du décor me déplut au plus haut point. Qui peut m'expliquer la nécessité d'intégrer un abri bus en tôle ondulée, d'une extrême laideur, au milieu de cette forêt qui se transforme peu à peu en déchetterie où s'accumulent canettes de boissons, robes oubliées, chaussures etc ?
Le metteur en scène donne ici une version où est mis en relief le côté sordide des situations et, une fois encore, j'ai regretté que, par nécessité (?) de moderniser, on se croit obligé de dénaturer. Le pauvre Lorenzo Da Ponte a dû se retourner dans sa tombe...
Certes, il s'agit d'une relecture et l'esprit créatif et provocateur de C. Guth peut plaire à certains. Cela n'est pas mon cas, hélàs ! Ma seule consolation a été d'écouter de fort belles voix et j'ai admiré tout particulièrement les artistes qui, malgré les invraisemblances de certaines scènes : au hasard, je citerai la gymnastique périlleuse effectuée par Don Giovanni alors qu'il est blessé au flanc et les poursuites sur un sol chaotique dans une semi-obscurité,n'ont pas démérité, bien au contraire.
Quelques très beaux moments m'ont consolée : le duo Don Giovanni/Zerline, d'une grande subtilité et l'aria de Zerline sur son escarpolette alors qu'elle tente de reconquérir Masetto.
J'ai admiré la puissance vocale de Leporello, l'interprétation très nuancée de Don Giovanni , la séduisante prestance de Masetto au timbre profond et les 3 héroïnes féminines- (peu gâtées par les costumes)- au chant sûr et sensible.
Bien sûr, j'ai gardé le cas d'Ottavio pour la fin : je fus conquise, sans restriction, par la performance vocale de Rolando, à la voix lumineuse, à la technique irréprochable et son interprétation de Dalla sua pace déclencha un tonnerre d'applaudissements. Un détail de mise en scène qui m'a plu, alors qu'il murmure cet aria avec de merveilleuses demi -teintes, Don Giovanni paraît et dessine avec le sang de sa blessure un coeur sur le pare brise de la voiture où attend Donna Anna et y plaque un baiser.
Le public réagit aussi très vivement après Il mio Tesoro que Rolando chanta superbement, avec un souffle jamais pris en défaut et une virtuosité impressionnante.
J'ai souvent déclaré mon admiration pour le génie de Rolando à s'impliquer totalement dans les rôles qu'il incarne au point qu'il devient Hoffmann, Nemorino, Don Carlo,Roméo etc mais pour la première fois,malgré ses efforts, il ne m'a pas convaincue dans ce rôle de couard qui recule devant le moindre obstacle et est le spectateur résigné, quasi consentant de son malheureux destin.
Impossible d'oublier la direction autoritaire et inspirée de D. Barenboïm à la tête du Staatskapelle de Berlin.
Une chose est certaine : ce spectacle ne peut laisser indifférent.
Catherine
foto: Catherine |
foto: Catherine |
foto: Catherine |
foto: Catherine |
foto: Danièle |
foto: Danièle |
foto: Danièle |
Merci, Catherine et Danièle de vos croniques et des merveilleuses photos.
RépondreSupprimerIl est tout à fait normal qu’une mise en scène (surtout si elle est moderne) provoque des opinions différentes.
Quelle joie de recevoir d’excellentes nouvelles de cette représentation qui – paraît-il – était géniale du point de vue des chanteurs et surtout de celui de Rolando!
Quelques mots sur Don Ottavio. J’ai lu d’innombrables analyses, articles, essais, opinions des musicologues, et malheureusement (???) il faut dire que Mozart avait créé Don Ottavio un peu „mou”, c’est un homme sans autorité, sans volonté. Donc si cette mise en scène nous offre un tel caractère, c’est une conception authentique.
Les musicologues disent que Mozart avait composé ses plus belles mélodies pour Don Ottavio (Dalla sua pace et Il mio tesoro) pour lui demander pardon de ce caractère peu héroïque …
J’ai beaucoup aimé Rolando dans ce caractère tellement différent de ceux qu’il incarne habituellement sur scène. Une nouvelle couleur sur sa palette déjà très riche.
I am completely intrigued by the discrepancy in interpretation of the character Don Ottavio first, then Rolando's interpretation of Don Ottavio.The opinions are poles apart, which makes me want to come and see for myself.
RépondreSupprimerMaybe this was what interested Rolando about this take on the role--definitely not a typical one. It sounds like this Don Ottavio is much more complex; we at times love him, at times not so much. I think Rolando is always eager to look more deeply into the character and explore virtues and flaws alike. So is Don Ottavio singing Dalla sua pace ironically? Wow, that would be a nasty twist.
But there are more perfomances to come and more opinions to share. Bring them on!
Thank you for all! That's right - Rolando is an excellent Ottavio. I have seen countless "Giovannis" with extraordinary singers of this role. The deduction Rolando's - singing and interpretation is absolutaly beautiful. Each of his scenes (particularly the two arias) are a special joy and a pleasure. Luckily he sings this role in January 4x in Vienna, but in a somewhat old-fashioned staging. But it will also create this.
RépondreSupprimerMerci Danièle et Catherine vos photos très belles et vos chroniques intéressantes .Vos ressentis ,émotions sont bien rendus.
RépondreSupprimerIl est vrai que Don Ottavio est un personnage assez mièvre ,sans personnalité marquante ,mais les arias sont splendides ,divinement interprétées par Rolando .
Quant à la mise en scène trop modernisée ,je n'y adhère pas toujours .
Merci
Thank you Catherine and Daniéle for the photos and reports.
RépondreSupprimerSome other personal minds from Don Ottavio.
For me, Don Ottavio is Don Giovanni's counterpoint. Guiding principle of his life is the love of Donna Anna. His every action, every conception is determined by this. Nothing else can't, and does not want to care. Don Giovanni is an active person, but Don Ottavio is a thoughtful one. Reliable, but perhaps a little boring character.
I think it not be a coincidence that Mozart has written him this two amazing arias.
In my opinion, Rolando is perfect in this character, too.His transsubstation as like as in the other roles. We might not like seeing him like this, but he is Don Ottavio himself.
Thank you, once more Rolando.
VIVA MOZART! VIVA DON OTTAVIO! VIVA ROLANDO!
Lors de la version concert de Don Giovanni à Baden avec Yannick Nezet Seguin, Rolando avait exprimé sa façon de voir Don Ottavio, qui était très différente de celle de Guth.
RépondreSupprimerRolando donnait plus de personnalité, de force, à son personnage, ce n'était pas le cocu ridicule, mais un homme d'une grande tolérance, de compréhension , d'intelligence et d'amour pour Donna Anna.
Je préfère de beaucoup ce Don Ottavio qui me semble plus intéressant et qui convient mieux à la personnalité de Rolando.
I think when Rolando is on stage, the most important for him is not to be in accordance with his own personality – but to embody fully and in all aspects the character he is portraying. That is why the roles fit him like a glove. For example, in “Lucio Silla”, he is the perfect brutal dictator who behaves in an incredibly cruel way even with the woman he loves.
RépondreSupprimerMozart created a Don Ottavio who does not accept the violence, who is incapable of acts of physical vengeance, and this is clearly pronounced by his words in the opera (“Un ricorso vo’ far a chi si deve…” – “I shall lodge a formal complaint…” … “Convien chimare il ciglio ai voleri del ciel” – “The best thing we can do is submit to the will of heaven”).
But his deep and unconditional love for Donna Anna, his comprehension to her pain are unquestioned (“Ah, si segua il suo passo: io vo’ con lei dividere I martiri, Saran meco men gravi I suoi sospiri” – “Ah, Í must follow her: I am determined to share her grief, her sorrow will be less if I am with her”).
The singing of Rolando, full of zest, power, fire and passion is not in contradiction with his incapacity of physical acting.
In Rolando's singing, we hear the very strong feelings of Don Ottavio against Don Giovanni, a deep pity for Donna Elvira and – an endless love for Donna Anna, this emotion being the prime mover of his life.
Ha sido muy interesante ver la discrepancia que nuestras amigas han encontrado entre el personaje y la persona que canta (Roli). Muchas gracias por estas reflexiones.
RépondreSupprimerAbrazos villazonistas.
It is exiting to see how differently we experience opera! - I attended
RépondreSupprimerDon Giovanni on 21th and 24th. In my eyes Rolando is a champion in his
interpretations showing the strong ambivalence of the characters, like
Don Jose, Don Carlo, Werther. Unhappy anti-heroes, really, and we can
feel with them. This Ottavio seemed to be one of these complicated
guys, in a way. Anyway, this time Rolando didn't have to kill anybody,
or himself.
In my eyes, here Don Ottavio is a man who takes a step forwards and
quickly another step backwards. Sometimes he starts acting very
determined but then is scared of his own power and draws back, passing
the responsibility to others. It is so recognizable in the real
life... Ottavio wants to love Anna, yes but then no. This Anna isn't
very reliable, either. Don Ottavio doesn't act out his desperation
like the other Dons or Werther, but stumbles inside himself in his
conflicts.
In my eyes Ottavio's love here really wasn't steady or unconditional,
unlike in the CD version. Here in Ottavio's last scene he sings
determined "I must follow her...share her grief", picking up her
things, then halts powerless, drops her things and makes an annoyed
gesture and rushes away.
Don Ottavio was a guy to feel with. As Don Ottavio, Rolando makes some
funny gags of helplessness, but in my eyes Rolando's interpretation
does not make Ottavio ridiculous.
In this Don Giovanni there is no reconciliation, no harmony, no happy
couples at the end. Everybody is left alone, straying in a strenuous
terrain. For me, it was a puzzling and thus fascinating version of Don
Giovanni.
RépondreSupprimerDon Ottavio is not the first and not the only one anti-hero in Rolando’s career. For example: Don Carlo, Werther, Hoffmann, Don José, and for me Alfredo is an anti-hero, too. We love them all, nevertheless this characters are in conflict with Rolando’s personality. He had personified all of them (such Don Ottavio) with a deep empathy. Don Ottavio is a reflective person, who is unable to act but his words always expressed his desire to act: “Tutto il mio sangue verseró se bisogna; ma dov’é il scellerato?” In my opinion he is not a foolish person in spite of that his reactions are extramly sometimes (perhaps in the auto scene). And this Don Ottavio is very human, peccable, little boring but creditable.
I agree to you, Anneli, when you say that Ottavio's love is not unconditional. The scene you mention shows the process of realization. He now knows that Donna Anna will never love him, even if she tells him that one day she might do so. Giovanni has attracted her from the beginning and she seems to follow him in this scene. She has given up her thought of revenge. And Don Ottavio is disappointed (you can see this in the photo with the three candles on the ground).
RépondreSupprimerAnother scene shows that Ottavio tries to find out whether Donna Anna really loves him and and not Giovanni. When Leporello is sitting on top of that waiting room at the bus stop and is mistaken for Giovanni and everyone is asking for punishment Ottavio finally pours petrol round this place and offers Donna Anna a lighter twice so that she could take revenge on Giovanni. But she backs off with a disgusted look. Ottavio has not reached his aim to get rid of his rival Don Giovanni. You can notice Ottavio's anger and helplessness and feel with him. I found Rolando's acting very convincing in this scene although I think that the idea to hide a canister full of petrol behind a tree in the wood seems a bit strange. Kris